À quel titre, nous dira-t-on, revendiquez-vous La Fontaine ? En quoi ce clair génie, cet esprit sain, limpide, harmonieux, relève-t-il du pathologiste ? En le disséquant fibre à fibre, nous le ferez-vous mieux connaître ? N'avons-nous pas, qui nous révèlent suffisamment sa personnalité, ses Contes et surtout ses Fables ? Le « bonhomme » ne nous y apparaît-il pas tel qu'il fut, tel qu'il devait être ? Taine, ce profond psychologue, l'a pensé ainsi, qui n'a pas séparé l'homme de son œuvre principale ; mais est-il là tout entier ? N'est-ce pas plutôt dans sa correspondance, dans les pièces écrites au jour le jour de l'inspiration, celles qu'il ne revit pas, qu'il ne retoucha pas, que l'écrivain se décèle en sa vérité profonde ? « Les manifestations spontanées de la vie psychique impliquent presque toujours une certaine irréflexion. La spontanéité se caractérise par l'absence de tout raisonnement subtil, de tout calcul, de toute hypocrisie intéressée : elle nous fait connaître une conscience dans toute sa nudité, c'est-à-dire dépouillée des formes simulées dont peuvent l'envelopper la réflexion et la raison[1]. » Ce n'est pas qu'il faille faire fi de l'œuvre de longue haleine, mais l'œuvre spontanée, pour éclairer le caractère, est également utile à connaître, indépendamment de ce qui constitue la base de toute psychologie individuelle : les notions d'hérédité et d'évolution, physique et psychique, du sujet à étudier.