Depuis sa première publication en 1909, il apparaît très clairement que l'histoire de Martin Eden, héros au génie incompris, possède de nombreux points communs avec celle de son créateur. Tous deux sont des aventuriers, tous deux sont avides de se hisser au niveau de n'importe quel jeune homme de la classe bourgeoise. Tous deux sont autodidactes, rejetant ainsi la culture banale des riches de ce monde. Martin Eden reste, cependant, un ouvrage extrêmement romanesque. Il nous conte l'ascension douloureuse, puis l'abandon fatal qui conclut cette ascension, d'un jeune homme pauvre aveuglé par l'amour et les richesses dont il a toujours été privé. Il ne s'agit pas seulement d'un roman d'apprentissage, mais aussi du récit d'un désenchantement, du refus catégorique de se conformer à la vision commune de l'élite d'une société qui se gangrène, hermétiquement fermée à toute pensée originale, aussi brillante fût-elle. Il faut souligner que, malgré une similarité entre la vie de Eden et de London, l'auteur a toujours protesté : cette œuvre est une attaque contre le philosophe Nietzsche et l'individualisme. Néanmoins, dans son autobiographie, il dit "Martin Éden, c'est moi".