Comme tant d'autres «E.V.D.G. Engagés Volontaires pour la Durée de la Guerre », Jacques, dix huit ans, quitte un modeste emploi de livreur chez un libraire de Fontainebleau pour partir au front rejoindre quelque part vers Pont-de-Roide, dans le Doubs, une «Armée des Gueux » digne de l'An II et de Victor Hugo
Il y retrouvera de vieilles connaissances : la faim, la peur, le froid, la misère et l'horreur d'une guerre qui lui ont volé son enfance et son adolescence, comme à toute une génération rétamée la génération rutabaga- mais aussi l'amitié fraternelle entre citoyens du monde, citoyens de la dèche unis sans se poser de questions contre la barbarie nazie.
Les questions surviendront un peu plus tard
A peu près au même moment, à Rennes, Yvette et Jeannine, dix-sept ans, petites employées des Postes, partagent la même piaule froide, les maigres provisions que leur propriétaire ne leur vole pas en douce et la lecture des «Lettres françaises ».
En dernière page, on y trouve parfois, entre autres, les petites annonces de soldats en quête d'une «marraine de guerre »
Après le 8 mai 1945, Jacques, volontaire pour le CEFEO, le Corps Expéditionnaire Français en Extrême-Orient, part se battre contre les Japonais occupant toujours une Indochine rebelle sur la voie de l'indépendance
Ainsi, de décembre 1944 à décembre 1947, n'ayant jamais eu le loisir de se voir autrement qu'en photo, Jacques et Yvette entretiendront une relation épistolaire où, mine de rien, l'amour fera son apparition à pas de loup, jusqu'à ce jour de décembre 1947 où Paris sous la neige les précipitera ensemble dans le tourbillon plein d'espoirs d'une nouvelle vie