Extrait :
Chargé de prendre aujourd'hui la parole par M. le Procureur Général Herbaux, auquel je suis heureux de pouvoir adresser publiquement de nouvelles et respectueuses félicitations pour sa nomination au poste élevé que lui ont valu ses éminentes qualités et ses brillants services, j'ai cru bon, dans le choix du sujet de ce discours, de me conformer au goût marqué du jour pour les choses du passé.
Quelle est cette mystérieuse puissance qui nous attire ainsi vers elles ? Ne cherchons-nous que la satisfaction d'une banale curiosité, ou plutôt, n'obéissons-nous pas à un sentiment plus élevé qui nous porte à nous rapprocher de tout ce qui fut mêlé à la vie de nos pères ? Pieux pèlerinage qui nous permet de mieux les comprendre, en les étudiant dans le cadre où ils ont vécu, qui nous met en communication plus directe et plus intime avec eux, qui fait passer dans notre âme quelque chose de leur âme, qui nous fait aimer davantage tout ce qu'ils ont aimé : le sol de la patrie, sa grandeur et sa gloire. Je vous convie donc, Messieurs, à remonter avec moi d'un siècle en arrière, pour nous retrouver à Rennes, en l'an 1800.
1800, date rayonnante et féconde pour la France qui, retrouvant toute sa vigueur et toute son énergie, sentant en quelque sorte courir dans ses veines un sang rajeuni, sut mener de front, en cette année fameuse, et ces pacifiques travaux de réorganisation qu'attendait le pays et ces audacieuses expéditions militaires que couronnait la victoire.
Pour ne pas ressembler au Directoire qui, suivant le mot énergique de M. Thiers, ne différait de la Terreur que « par plus d'anarchie et moins de cruauté » , le nouveau Gouvernement se mit résolument à l'œuvre et parvint, dès l'an VIII, à doter le pays d'un grand nombre de lois nécessaires, notamment de lois financières qui assuraient au Trésor épuisé les ressources dont il avait tant besoin, et de ces deux lois organiques du 28 pluviôse et du 27 ventôse, dont l'une constituait les grandes lignes de notre régime départemental et communal, et dont l'autre créait notre système judiciaire avec ses Tribunaux de première instance et ses juridictions d'appel.