Pourquoi publier aujourd'hui des textes dont l'un, au moins, a trente-trois ans d'âge ? La guerre, la Résistance, pourquoi avoir attendu si longtemps pour en parler ? A la vérité, je n'avais jamais songé à monter en épingle cette période de ma vie, mais il se trouve qu'il y a deux ans, un ami m'a demandé de rédiger mes souvenirs de femme-diplomate. J'ai écrit Par une porte entrebâillée, j'ai continué sur la lancée, et sur la lancée j'ai raconté inévitables la guerre et la Résistance. J'avoue que j'ai été heureuse de parler de la seconde, non pour me tresser des couronnes que je ne mérite pas, mais pour marquer que, contrairement à ce que d'aucuns prétendent, il n'y a pas eu que les petites gens et les communistes à risquer leur peau pour la Liberté, et cela bien avant 44, n'est-ce pas, André Malraux ? Oui, je parle d'un passé démodé, et le portrait de jeune femme qui illustre cette page en est pour moi le témoignage affligeant. Mais ce passé démodé, c'est de l'histoire, une histoire à beaucoup d'égards honteuse (qui, de ma génération, pourrait, après juin 40, comme on l'a fait pendant vingt ans, brocarder aujourd'hui Caporetto ?). Ce passé, tout ce que je demande à Dieu c'est de ne pas le ressusciter demain.