« Mon impression ? Elle sera nette.
Hier matin, je disais : "Rien ne me prouve que Dreyfus soit coupable mais rien ne me prouve, non plus, qu'il soit innocent". Hier soir, Me Labori, une dizaine de camarades (que je ne nomme point parce qu'appartenant à des journaux d'opinion contraire, où la constatation publique du fait leur pourrait nuire) et moi-même, sommes sortis de la salle d'audience absolument troublés ; inclinant bien davantage que précédemment à admettre qu'une erreur avait été commise.
Il faut avoir la vaillance de ses opinions, surtout quand elles sont dangereuses et vous exposent à l'injure. D'ailleurs, les gémonies me paraissent, en ce moment, sinon le dernier salon où l'on cause, du moins celui où l'on discute librement entre libres esprits. La compagnie y devient bonne... préférable en tout cas. »