A petit feu

Grille, le député de la Martinique, a déclaré, chargé sur une tribune, l'éloge funèbre de Baranda, tandis que le cadavre de celui-ci a été brûlé dans le grand crématoire, selon l'ordre du testament.

- "Si sa vie a été un martyre lent", a déclaré l'orateur, "son corps fond également sur un feu doux".

La procession se répandit dans les allées de l'immense nécropole dans laquelle se trouvent trois millions de morts et dont la surface s'élève à plus de quatre-vingt mille monuments.

Combien de coins ignorés! Quelle tombe brisée à travers les fissures des pierres tombales desquelles pousse l'ortie grandit vicieusement! Avec difficulté, ils pourraient déchiffrer leurs noms, qui couraient peut-être un jour de bouche à oreille. Sur beaucoup de feuilles tombées la couverture sèche de feuilles formant un tapis de paille. Des fragments de couronnes et de bouquets fanés pendaient encore des pierres tombales de certains.

Non loin de la fournaise, dont les immenses cheminées ressemblent à celles d'une usine, se trouve le cimetière musulman, une sorte de mosquée fortifiée. Parmi les yerba, quelques pierres tumulaires se détachent, sans inscriptions, parsemées de cailloux et de pots cassés.

"Parmi les musulmans, il y a une tendance à jeter des pierres, en signe de piété, sur les tombes d'amis", a observé Grille.

"Il est préférable qu'ils soient jetés à la mort que dans la vie", a déclaré Plutarque.

Dans certaines allées, où les briques et le mélange étaient empilés, les jardiniers et les maçons ont désherbé et nettoyé le cimetière dans une brume mélancolique. Dans un coin, deux fossoyeurs creusèrent une tombe. Puis ils ont abaissé un sarcophage, grand et lourd, en le recouvrant de terre qui, tombant sur le couvercle, résonnait comme un tambour en bois. Certaines femmes pleuraient autour du trou.

"Le Père-Lachaise", dit Plutarque, "n'invite pas à la mort. Il y a des cimetières agréables et riants qui invitent à la méditation et au nirvana. Ça, non.

Les fouilles ont laissé une humidité maléfique du paludisme. À chaque étape, ils ont trouvé le tombeau d'une célébrité: Balzac, Casimiro Delavigne, Gérardo de Nerval, Michelet, Delacroix et d'autres.

"Ce n'est qu'en évoquant ces august ombres que tu pourras venir ici", dit Grille solennellement.

Plutarque lisait au hasard des épigraphes mortuaires, dont beaucoup le poussaient à rire des pédants. Soudain, il s'arrêta devant un monument à moitié en ruine et complètement abandonné. La rouille a rongé la barrière qui coule et la mousse recouvre la pierre tombale.

"Qui sera-ce?" Demanda-t-il.

Grille s'inclinant, lisez: Barrás.

Marchant au hasard, ils tombèrent sur le mausolée d'Abelardo et Eloisa.

- Il y a toujours de l'amour! s'écria Grille. Voyez ce que c'est avec les violettes, les lilas et les roses.

Ils sont retournés aux quatre crématoires, autour duquel s'étendent deux grandes galeries sans portes, pleines de pierres tombales et de portraits.

Là, dans les cercueils lilliputiens, les incinérés sont conservés. Ils venaient de déposer les cendres d'Eustaquio Baranda dans leur niche. A côté de lui une femme en deuil pieusement posée, défait en larmes, un bouquet de violettes.

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