"Les esprits réfléchis, que les événements actuels, si extraordinaires qu'ils soient, n'absorbent pas, et qui, au milieu de tant de vicissitudes, conservent encore assez de liberté pour songer au passé, et gardent toutes choses à leurs plans respectifs, ont paru se féliciter de voir paraître le manuscrit original d'une œuvre dont l'objet était de jeter la pleine lumière de la vérité sur le fait le plus dramatique assurément, et aussi le plus dénaturé, de l'histoire d'Amérique. Sans discuter ici la portée des raisons que l'auteur avait pu avoir de publier son ouvrage en anglais, il y avait bien eu quelque anomalie en cela ; il semblait étrange qu'une œuvre, où nos ancêtres et nous étions directement intéressés, n'eût pas vu le jour en notre langue, et que les persécuteurs de notre race n'eussent pas encore été flétris dans ce parler français qu'ils avaient été bien incapables d'étouffer sur les lèvres des Acadiens. Aussi bien, Édouard Richard avait toujours eu l'intention de combler lui-même cette lacune et de doter notre littérature historique du monument qui lui manquait. Un événement toujours imprévu la mort l'en ayant empêché, nous avons cru de notre devoir d'exécuter sa volonté. Et tous les bons esprits s'en sont réjoui. Nous ne mentionnerons pas ici les lettres particulières que nous avons reçues à ce sujet des plus éminents personnages : ces approbations spontanées nous ont été extrêmement précieuses, mais elles ne doivent pas sortir de nos archives personnelles. Nous en tenant donc aux articles de journaux et de revues consacrés à notre tome premier, ces appréciations ont été bienveillantes et de nature à nous encourager. Les critiques d'ensemble, les jugements synthétiques ne pourront être émis que lorsque l'ouvrage aura été complété. Cependant l'apparition de la première partie a éveillé suffisamment de curiosité intelligente et sympathique pour nous persuader que notre travail venait à son heure, et qu'il avait sa place marquée au foyer de tous ceux qui pensent et qui se souviennent..."