Mondadori Store

Trova Mondadori Store

Benvenuto
Accedi o registrati

lista preferiti

Per utilizzare la funzione prodotti desiderati devi accedere o registrarti

Vai al carrello
 prodotti nel carrello

Totale  articoli

0,00 € IVA Inclusa

J'avais huit ans. Je venais de perdre ma mère et j'arrivais à Paris.

La main dans la main de mon tuteur, je descendais l'escalier de la gare, toute petite dans les vêtements noirs du premier deuil. De la ville énorme, des masses régulières des maisons où le couchant incendiait les enseignes dorées, des vastes perspectives rayonnant autour de la place centrale, il m'est resté de confuses sensations d'étendue, de bruit, de mouvement, et sur l'ardoise violette des toits, sur les platanes effeuillés, sur la foule bariolée ou sombre, la gloire fantastique d'un ciel vert traversé de flammes roses. Mon tuteur, déjà voûté, me conduit doucement, sa bonne face placide alourdie de mélancolie. Puis mes souvenirs deviennent vagues. Je revois un escalier, une antichambre obscure et soudain le luxe d'un salon blanc et or où une grande femme blonde tente vainement de m'embrasser.

Ah ! la petite sauvage ! s'exclame-t-elle devant le mouvement de recul involontaire qui me rejette vers mon tuteur.

Celui-ci répond. Un colloque s'engage et, pendant ce temps, j'examine le mobilier en velours de Gênes, la photographie d'un petit garçon qui me regarde d'un air renfrogné, les beaux candélabres de la cheminée, et surtout la dame : la belle madame Gannerault, la femme de mon parrain, dont on a parlé devant moi deux ou trois fois dans ma vie. Elle ressemble, cette dame, aux portraits d'actrices entrevus tout à l'heure à la vitrine d'un papetier. Elle a cette coiffure ondulée et longue, ce décolletage encadré de ruches blanches, le médaillon d'or au cou, l'embonpoint naissant, le galbe un peu lourd des cantatrices à la mode. Sa traîne, où se mêlent des nœuds et des volants compliqués, la rend plus majestueuse encore. Des bracelets tintent dans les dentelles de ses manches. Elle sent bon la poudre de riz. Ah ! certes, dans mes songeries d'enfant, pendant le voyage d'Auray à Paris, je n'imaginais point que parrain Gannerault, humble et bonhomme, pût avoir une épouse si parfaitement imposante, digne en tout point du salon blanc et or.

Mon ami, vous pouvez y compter. Je serai sa mère. L'enfant de cette pauvre Jeanne ! Elle a huit ans, dites-vous ? Voilà une bien petite sœur pour notre grand Maxime. Allons, ne crains rien, mignonne. Il faut m'embrasser.

Oui, madame.

M'aimer un peu.

Oui, madame.

Et m'appeler maman.

L'appeler maman ! Je ne sais quel sentiment où se mêlaient la religion de l'habitude, l'effroi du deuil récent, une antipathie inexplicable pour cette élégance, cette poudre de riz, ces grâces maniérées, me fit détourner la tête. Je me rapprochai de mon parrain et je fondis en larmes.

La dame blonde restait consternée. Pendant que M. Gannerault, ému, me consolait, cherchant de douces paroles : » Marianne, voyons, Marianne, mon enfant ! » un désespoir puéril, immense, me secouait. Maman, maman ! Non, je ne pourrais pas, je ne voulais pas l'appeler maman, cette dame trop grande, trop belle, trop élégante, près de qui j'allais vivre désormais. Il demeurerait, le nom cher et sacré, premier balbutiement des lèvres innocentes, à la pauvre morte endormie dans le cimetière d'Auray. Ce nom l'évoquait tout entière, mince, blanche sous ses bandeaux noirs, l'air délicat, la voix faible et douce, telle que je la voyais tout le jour assise à son bureau avec ses livres, ses papiers, son menu bagage d'institutrice étalé devant elle. Car elle était institutrice et de la plus modeste catégorie, suppléant les religieuses enseignantes du couvent voisin et donnant des leçons mal rétribuées dans quelques familles de vieille noblesse, altières et pauvres. Pourquoi ma mère, si jeune vingt-sept, vingt-huit ans au plus vivait-elle ainsi toute seule ? Pourquoi n'avais-je pas un aïeul indulgent, une tendre grand'maman toute blanche ? Je savais que mon père était mort. Où donc ? En quelles circonstances ? Il y avait dans l'histoire de ma famille un tas de noms, de détails, de mystères que je

Dettagli down

Generi Romanzi e Letterature » Romanzi contemporanei

Editore Gilbert Terol

Formato Ebook con Adobe DRM

Pubblicato 14/08/2019

Lingua Francese

EAN-13 1230003364680

0 recensioni dei lettori  media voto 0  su  5

Scrivi una recensione per "Avant l'amour"

Avant l
 

Accedi o Registrati  per aggiungere una recensione

usa questo box per dare una valutazione all'articolo: leggi le linee guida
torna su Torna in cima