Il ne faut pas toujours dire d'un homme qui tient un poisson à la main : c'est un pêcheur.
Judith Gautier.
L'intérieur misérable d'un bateau de pêcheur amarré sur le fleuve, contre la berge. Il fait sombre ; il fait froid. Une lueur très pâle, une lueur sourde de nuit sans lune entre par deux petites lucarnes, éclaire vaguement, çà et là, la pièce basse, remplie de pesantes ténèbres. Près d'un poêle sans feu, la mère est assise sur un escabeau et allaite un nouveau né. Une grande fille de quinze ans est couchée sur un matelas fait de guenilles entassées. Six enfants grouillent dans l'ombre. Les uns pleurent et se plaignent ; les autres dorment. Au dehors, le vent siffle et secoue les plaques de zinc dont est recouvert le toit du bateau. Le fleuve clapote. De temps en temps les trains de bateaux passent, le long de l'autre berge ; leurs machines gémissent et hurlent dans la nuit.