Ce fut en 1076, vers le même temps où le Cid, ce héros des Espagnes, soumettait à Alphonse VI Tolède et toute la Castille-Nouvelle, qu'éclatèrent les démêlés entre l'empereur Henri IV et le souverain pontife Grégoire VII : voici à quelle occasion.
L'esprit de liberté avait soufflé sur l'Italie ; les marins aventureux qui bordent les côtes en avaient respiré les premières haleines ; Venise, Gênes, Pise, Gaète, Naples, Amalfi, s'étaient constituées en républiques, tandis que l'intérieur des terres continuait d'obéir à Henri IV d'Allemagne. L'héritage de saint Pierre lui-même, sans être directement soumis à l'empire, reconnaissait encore son inféodation, en permettant que la nomination des papes fût confirmée par les empereurs ; mais déjà le Milanais Alexandre II avait refusé de déposer sa tiare pour recevoir le baptême de la féodalité, lorsque le moine Hildebrand fut appelé en 1073 au pontificat sous le nom de Grégoire VII.
Non-seulement le nouveau pape, dans lequel devait se personnifier la démocratie du moyen-âge, suivit l'exemple d'Alexandre ; mais encore trois ans à peine s'étaient écoulés depuis son exaltation, que, jetant les yeux sur l'Europe, et voyant le peuple poindre partout comme les blés en avril, il avait compris que c'était à lui, successeur de saint Pierre, de recueillir cette moisson de liberté qu'avait semée la parole du Christ. Dès 1076, il publia une décrétale qui défendait à ses successeurs de soumettre leur nomination à la puissance temporelle ; dès-lors la chaire pontificale se trouva placée au même étage que le trône de l'empereur, et le peuple eut son César.
Cependant Henri IV n'était pas plus de caractère à renoncer à ses droits que Grégoire VII n'était d'esprit à s'y soumettre. Il répondit à la décrétale par un rescrit ; son ambassadeur vint en son nom à Rome ordonner au souverain pontife de déposer la tiare, et aux cardinaux de se rendre à sa cour, afin de désigner un autre pape ; la lance avait rencontré le bouclier, le fer avait repoussé le fer.
Grégoire VII répondit en excommuniant l'empereur.
À la nouvelle de cette mesure, les princes allemands se rassemblèrent à Terbourg, et comme l'empereur, emporté par la colère, avait dépassé ses droits, qui s'étendaient à l'investiture et non à la nomination, ils le menacèrent de le déposer, en vertu du même pouvoir qui l'avait élu, si, dans le terme d'une année, il ne s'était pas réconcilié avec le saint-siège.