Tenez-lui les bras, miss Abbot ; on dirait une chatte folle.
C'est une honte, cria la femme de chambre. Quelle conduite inconvenante, miss Eyre ! Frapper un jeune gentleman, le fils de votre bienfaitrice ! Votre jeune maître !
Maître ! Comment est-il mon maître ? Est-ce que je suis une domestique ?
Non ; vous êtes moins qu'une domestique, car vous ne faites rien pour gagner votre entretien. Là, asseyez-vous, et réfléchissez à votre méchanceté.
Elles m'avaient conduite, pendant ce temps, dans la pièce indiquée par Mme Reed, et elles m'avaient jetée sur une chaise.
Bessie, s'adressant à moi, dit :
Prenez garde, mademoiselle, que vous avez des obligations envers Mme Reed ; elle vous nourrit ; si elle vous renvoyait, vous seriez obligée d'aller à la maison des pauvres.
Je n'avais rien à répondre à ces paroles, elles n'étaient pas nouvelles pour moi ; mes plus anciens souvenirs me rappelaient des avis semblables. Ce reproche de ma dépendance était devenu comme un tintement vague dans mon oreille. J'en souffrais beaucoup, mais je ne comprenais qu'à demi. Miss Abbot ajouta :
Et vous ne devez pas vous regarder comme l'égale des demoiselles Reed et de M. Reed, parce que madame a la bonté de vous laisser élever avec eux. Ils auront beaucoup d'argent, et vous n'en aurez point. Votre rôle est d'être humble, et de tâcher de leur être agréable.
Ce que nous vous disons est pour votre bien, reprit Bessie d'une voix moins sévère ; vous devriez essayer de vous rendre utile et aimable ; alors vous pourriez avoir un abri dans cette maison ; mais, si vous devenez violente, madame vous renverra, pour sûr.
De plus, dit miss Abbot, Dieu la punira ; il peut la faire mourir au milieu de ses scènes, et alors où irait-elle ? Venez, Bessie, laissons-la. Pour rien au monde, je ne voudrais avoir un cœur comme le sien. Dites vos prières, miss Eyre.