On entrait dans la troisième année de la Guerre de Sept Ans qui allait coûter si cher à la France et dont l'Angleterre allait tirer de larges compensations.
Au printemps de 1758, tandis qu'une flotte anglaise d'au-delà de cent cinquante navires, sous les ordres de l'amiral Boscawen, voguait vers Louisbourg pour faire le siège de la place et l'emporter, le général anglais Abercromby se dirigeait vers la frontière canadienne, par voie du Lac Saint-Sacrement, avec plus de quinze mille hommes, une quantité énorme de bagages et un formidable matériel de campagne et de siège. Cette armée monstrueuse à elle seule était la plus grande menace de toutes les années d'épreuves et de combats qu'avait vécues la Nouvelle-France. Et si l'on ajoute une deuxième armée de sept mille hommes qui par l'Ohio gagnait Détroit et les Grands Lacs pour s'emparer de postes importants qu'y défendaient seulement quelques bataillons de Français et de Canadiens, nous avons une juste idée des dangers qu'offrait cette invasion. Encore une fois, la France se voyait contrainte de lutter, pour la sauvegarde de ses colonies, contre un ennemi dix fois supérieur tant par le nombre de ses combattants et de ses navires de guerre, que par la fécondité de son trésor national et la productivité de ses industries.