Le premier acte, à Paris, chez Bougnol ; les deuxième et troisième, à Montgeron, chez Rothanger.
ACTE I
Un salon : porte au fond ; portes latérales ; une fenêtre au fond ; table, chaises, fauteuils, etc.
Scène première
Bougnol ; puis Gaudin
Au lever du rideau, Bougnol est debout devant un portrait de vieille femme accroché au mur. Il tient un papier à la main et récite un compliment qu'il apprend par cœur.
Bougnol, lisant.
"Laure ! ma chère Laure ! Enfin, nous voilà seuls !" C'est un speech que j'apprends pour réciter ce soir à ma fiancée quand sa maman sera partie (Montrant le portrait.) Ca, c'est le portrait de ma grand'tante, mais je me persuade que c'est ma fiancée (Reprenant son compliment. Lisant.) "Ne tremble pas, enfant, je ne veux pas te faire de peine. Un mari n'est pas un maître c'est un esclave soumis et tendre Il se jette à genoux" (Parlé.) Ah !non, ça, c'est une indication "Soumis et tendre ! " V'lan ! je me jette à genoux ! (Il fait mine de se jeter à genoux et s'arrête.) Ah ! bigre ! mon pantalon me serre trop. Pourvu qu'il n'aille pas me faire des farces À "soumis et tendre", je vais lâcher un peu la boucle
Il la desserre.
Gaudin, entrant par la droite, un gros bouquet à la main.
Ce sont les dames de la halle qui viennent féliciter Monsieur, à l'occasion de son mariage
Bougnol.
Je n'ai pas le temps ! Donne-leur dix francs et dis-leur qu'elles m'ennuient !
Gaudin.
Non, monsieur
Il va placer le bouquet sur la cheminée à gauche.
Bougnol.
Comment, non ?
Gaudin.
Si vous voulez me le permettre, je ne leur donnerai que cent sous et une bonne parole ! Il faut savoir prendre les masses.
Bougnol.
Fais comme tu voudras
Gaudin, sortant.
Ah dame ! tout le monde ne sait pas prendre les masses !
Il disparaît.
Bougnol.
Ca me serre encore Reprenons mon compliment. "Laure ma chère Laure ! Enfin, nous voilà seuls !"