Lorsque je suis allé vous voir, il y a de cela plusieurs mois, dans votre laboratoire, pour vous présenter M. Vignon et les curieux documents relatifs au linceul de Turin dont nous faisions l'étude, aviez-vous le pressentiment des querelles passionnées que soulèverait dans la presse cette question que nous discutions si froidement, comme nous eussions fait d'un problème quelconque de physiologie ? Non, n'est-ce pas ! Et plus tard, lorsque M. Vignon, avec l'aide de M. Colson, eut trouvé l'explication scientifique de la formation de l'image sur le linceul, vous souvient-il de la joie profonde que nous avons éprouvée à posséder enfin le mot de l'énigme ? Pendant des semaines et des mois l'esprit était resté obsédé par cette contradiction déconcertante entre un fait matériel qui s'impose et l'apparente impossibilité de lui trouver une explication naturelle, donnant beau jeu à ceux qui acceptent les miracles, dont mes opinions philosophiques ne veulent à aucun prix. Et, tout d'un coup, voilà l'explication naturelle qui surgit, lumineuse dans sa simplicité, chassant le miracle. Naïvement, nous avions pensé que c'étaient les croyants, ceux du moins dont une religion trop étroite avait asservi l'esprit, qui nous en auraient su mauvais gré...