Le Robinson des demoiselles

Nos jeunes lecteurs sont invités à faire la connaissance d'Emma de Surville, jeune fille déjà très tôt malmenée par la vie. Fille unique d'un ménage de riches planteurs qui étaient installés à Saint-Domingue, mais qui durent s'enfuir suite à la révolte des esclaves en 1792, Emma de Surville naît lors de leur retour en France dans des conditions dramatiques, car sa mère meurt en la mettant au monde. Pour son père, très épris de sa jeune épouse, une orpheline qu'il avait épousée l'année précédente, la douleur est tellement impérieuse que sa première réaction est de rejeter cet enfant qui a involontairement causé la mort de la femme qu'il aimait. Heureusement pour Emma, M. de Surville peut compter sur Dominique, un ancien esclave noir devenu au fil des années le domestique de M. de Surville, puis un véritable ami de la famille. Dominique est un homme au cœur d'or, qui va s'occuper de la petite fille avec un soin quasiment maternel, gardant l'espoir durant de longs mois que M. de Surville acceptera tôt ou tard d'assumer sa paternité.
La famille s'est établie définitivement dans la région de Blois. et son niveau de vie permet à Dominique d'engager une nourrice pour pourvoir aux besoins de l'enfant. Lui-même passe de nombreux mois à apprendre au bébé le mot « papa ». Dominique a en effet une idée bien précise, qu'il finit par mettre en pratique au bout d'un an. M. de Surville vient ponctuellement se recueillir sur la tombe de sa femme. Un jour, il trouve sur cette tombe un panier d'osier où est couchée la petite Emma. L'enfant, à la vue de ce monsieur immense, qui la regarde avec ébahissement, ne dit que le seul mot qu'elle connaisse : « Papa ».
Le père indigne sent son cœur flancher, et il réalise enfin qu'il doit surmonter son chagrin pour élever sa fille. Dominique, sortant de sa cachette, reçoit les humbles remerciements de son ancien maître. Il sera le gouvernant de la petite, et l'élèvera avec amour, aux côtés du père reconnaissant. Des retrouvailles prophétiques, on le verra plus tard.
Hélas, il ne sera pas fait mystère aux douces têtes blondes que d'aussi belles vertus, pourtant hautement recommandables, ne font pas la richesse de ceux qui en bénéficient, et la famille de Surville ne jouissant plus des fastes esclavagistes de Saint-Domingue voit son niveau de vie sérieusement baisser. Bientôt, la famille se retrouve aux portes de la misère, la propriété familiale est hypothéquée et c'est avec bonheur que leur parvient la nouvelle d'un prodigieux héritage laissé par un cousin éloigné qui s'était établi en Argentine. La famille investit donc ses derniers napoléons dans ce voyage, et s'embarque tout entière pour Buenos Aires, avec le bon Dominique et même le chien Azor, devenu le plus fidèle compagnon d'Emma.

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