Il y a sept ans, au moment où le roi Alexandre venait de secouer la tutelle gênante de ses régents, M. Garachanine, qui n'avait pas revu depuis plusieurs années le jeune souverain, fut reçu par lui en audience. L'éminent homme politique serbe voulut bien alors communiquer à un de nos amis ses impressions sur Sa Majesté. «La dernière fois que je me trouvai face à face avec le roi, dit M. Garachanine à notre ami, il était encore un enfant; j'avais gardé le meilleur souvenir de sa nature loyale, mais je n'avais pas encore pu me faire une idée de ce qu'il serait à sa majorité, au moment où il prendrait les rênes du gouvernement.... Or, dans l'entrevue que je viens d'avoir avec mon souverain, mon jugement sur lui s'est formé d'une manière définitive. Le roi est un homme sérieux, à l'esprit réfléchi et qui a conscience de sa tâche. Mon pays peut se féliciter d'avoir un tel souverain.»
M. Garachanine ne parlait pas en l'air en s'exprimant ainsi. Il avait deviné chez son roi des qualités exceptionnelles, et les actes successifs par lesquels Alexandre Ier allait se signaler à l'attention du monde, devaient donner raison à l'homme d'état serbe.
Depuis le jour où il devint effectivement roi de Serbie. Alexandre Ier eut une seule préoccupation: mettre fin aux longs errements de son pays, en gouvernant d'après les aspirations de la nation et non d'après les vues étroites des partis. Ce ne fut pas une petite affaire que d'arrêter dans leur essor les luttes que se livraient les trois partis alors existants. Mais de l'esprit de suite et de la volonté pouvaient en avoir raison: et c'est ce que montra tout d'abord le jeune roi: un esprit tenace et un but nettement arrêté. On sait qu'il arriva peu à peu à accomplir sa tâche ardue.