Et tu iras ? Oui, dit le jeune homme avec décision, j'irai. En même temps, il fixa sur son ami ses yeux bleus à l'expression un peu changeante, et du bout des doigts roses et soignés, il tourna un moment avec vivacité l'extrémité de la fine moustache blonde. De grandeur moyenne, un peu massif pour ses vingt-quatre ans, à peine révolus, le baron de M. avait dans les manières, dans les vêtements, dans toute sa personne l'aisance simple d'un homme bien né. Tout à fait étranger à une morgue de mauvais aloi, il répandait indifféremment sur grands et petits la même courtoisie raffinée, un peu exotique. Cependant lorsqu'on s'étonnait, autour de lui, de le voir franchir ainsi sans effort la distance qui sépare un homme de son monde du commun des mortels, il souriait avec finesse. Moins que personne, en effet, il ignorait l'immense différence qui existe entre un baron d'ancienne race et un roturier sans aïeux et, s'il dédaignait de s'envelopper de hauteur, c'est qu'il prisait trop haut l'avantage de sa naissance pour juger utile la manifestation d'une mesquine vanité...